Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

Au détour d’une trajectoire personnelle et d’un travail de recherche sur Simone de Beauvoir conduit depuis plusieurs années, l’auteure relit le chapitre « La lesbienne » du Deuxième sexe, en mettant en évidence les aspects les plus détonants de l’œuvre, mais aussi ses faiblesses. Cette lecture permet de revenir sur la réception de l’œuvre et sur les résistances constructionnistes aux théories et aux arguments mobilisés par Beauvoir. D’une façon plus générale, c’est également l’occasion d’interroger les approches contemporaines, et queer notamment, des « classiques » de la littérature lesbienne et de (re)découvrir la « force » de Beauvoir et de ses œuvres.

                                                      Au pays dl'Olympe rainbow 

Simone de Beauvoir !

Qui était l’auteur du « Deuxième sexe », quels étaient ses positionnements par rapport aux femmes?

Marie-Jo Bonnet étudie l’œuvre de Simone de Beauvoir méticuleusement et, citations de l’œuvre à l’appui, mais aussi d’échanges épistolaires, d’écrits de tiers, d’interprétation psychanalytique de rêves relatés par l’écrivaine ou encore à la lumière de son enfance, nous découvre une personnalité inattendue.

Car enfin, Simone de Beauvoir n’apparaît-elle pas comme une papesse du féminisme ?…

 

Eh bien je dirais que j’ai senti là œuvre de déconstruction d’un mythe, déconstruction méthodique, sans haine mais sans complaisance et, lorsqu’on ressent un peu de compassion pour cette femme dont il en émanait bien peu, c’est pour ma part dans son âge avancé, à l’occasion d’un rêve qui dévoilerait peut-être un vécu difficile lié à un possible avortement.
« Possible », car Simone de Beauvoir a brouillé les pistes, a beaucoup menti et sa biographe met à jour toutes les parades, décrypte pour nous tout cela : d’une homosexualité camouflée mais avérée par de multiples témoignages et ses propres correspondances, d’une froideur confinant à la cruauté dans son absence de solidarité avec des jeunes femmes pâmées d’amour pour elle dont elle sait profiter des corps, dans des conduites peu glorieuses par rapport à des amies juives ou usant de termes tellement dépréciatifs vis-à-vis d’autres femmes quand elle ne les ignore pas scandaleusement… Une femme froide et guidée par sa revanche sur une histoire familiale qui la conduit à agir toujours en fonction de sa volonté d’égaler les hommes, de les égaler, elle, mais pas de défendre la promotion des femmes avec leurs particularités – les égaler, pour rejoindre ce sexe masculin glorieux entre tous.

 

Cet ouvrage est limpide, extrêmement documenté et passionnant, qui traverse une époque, éclaire sur le féminisme, livre un écrivain qui semble ne pas avoir aimé les femmes – mais s’aimait-elle elle-même ? Nous rencontrons un être complexe, haineuse dans ses rapports avec les mères des jeunes filles dont elle profite, les partageant avec Sartre, comme une prédatrice pour les instrumentaliser et assurer son propre ascendant sur Sartre sur lequel elle mettait en œuvre une emprise calculée. Marie-Jo Bonnet approfondit les ambivalences, développe une analyse très fine et pointue, toujours passionnante et vivante, dans ce livre qu’on ne lâche pas, quitte à éprouver par moments une très franche antipathie pour l’auteur des « Mémoires d’une jeune fille rangée ».

Véronique Poirson

Tag(s) : #J'aime
Partager cet article
Repost0
Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :